Journal de bord : Saxon-phonies



Touriste d'occasion, je commence à me rendre compte qu'il faut un sérieux entraînement pour perdurer dans cette discipline... qui, pour moi, tend à prendre des allures de marathon. Je vis en effet les instants critiques, vous savez ces moments quelque peu douloureux que l'on connaît souvent à mi-parcours, quand certains muscles se raidissent pour vous rappeler que quiconque veut aller loin — et finir la course — doit ménager sa monture. L'avertissement est d'autant plus à prendre en considération si la monture n'a plus vingt ans... ce qui est un petit peu mon cas ! J'ai passé quatre journées merveilleusement... crevantes à Berlin — à marcher, à piétiner, à tourner en rond par une chaleur un rien étouffante —, et je commence à avoir du mal à me lever... à l'heure habituelle ! Mais, reconnaissons-le, la situation n'est pas excessivement dramatique.

Je quitte donc Berlin la grande ville aux alentours de... dix heures trente ce matin. No comment, please ! La pluie a fait son apparition durant la nuit, apportant avec elle une sensation de fraîcheur plutôt bienvenue, laquelle m'a sans nul doute aidée à bénéficier d'un sommeil plus réparateur. Toutefois, à la vue de la route détrempée, je me demande quel temps il fera à Hanovre, mon escale touristique de la journée, où je dois arriver trois heures plus tard. Si je me pose la question, c'est que j'ai prévu de me promener dans les Jardins Royaux de Herrenhausen, qui sont à l'Allemagne — si je puis me permettre cette comparaison — ce que le parc du château de Versailles est à la France. Et que l'on soit botaniste ou pas, ce genre d'endroit, au demeurant magnifique, s'apprécie de préférence par un temps clément et pas trop humide. Maintenant, si le temps n'est pas vraiment de la partie, je me contenterai du Sea-Life, un aquarium de 3500 m2 situé dans le Berggarten — le jardin le plus au nord — à l'emplacement de l'ancienne serre tropicale, lequel présente tout de même près de cinq mille animaux marins répartis dans une trentaine de bassins, l'attraction majeure étant un tunnel en verre de huit mètres de long qui permet de voir des poissons imposants comme les requins évoluer au-dessus de sa tête !

Après cette pose détente, il me faudra trouver une station-service pour ravitailler la voiture — mine de rien, c'est que çà consomme une automobile — afin qu'elle puisse me véhiculer, c'est le cas de le dire, jusqu'à Schmallenberg, situé en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, et plus précisément jusqu'au Gasthof Braun Zum Hohen Knochen où je dois dîner et passer la nuit. Tout çà à près de trois heures de route de là !

Découverte : les Jardins Royaux de Herrenhausen



Un des plus beaux aménagements paysagers d'Europe, les Jardins Royaux de Herrenhausen — en allemand Herrenhäuser Gärten — sont au nombre de quatre, à savoir le Großer Garten ou Grand Jardin, le Berggarten ou Jardin de la Montagne, le Georgengarten ou Jardin de Georges et le Welfengarten ou Jardin des Welfs, répartis sur une surface globale de cent trente-cinq hectares.

Les Jardins Royaux de Herrenhausen Commencé en 1666 comme un jardin baroque à la demande d'Ernest-Auguste de Hanovre et de son épouse Sophie de Bohême, le Großer Garten ou Grand Jardin (photo ci-contre) prit sa forme actuelle de jardin à la française à partir de 1696, après l'élévation à la dignité de neuvième prince-électeur d'Ernest-Auguste de Hanovre. A la mort de ce dernier en 1698, sa veuve se consacra pleinement à son jardin, en en faisant même le centre de sa vie. Elle y mourut même en 1714, alors qu'elle se promenait dans une des nombreuses allées, l'année même de l'achèvement des différents aménagements, inspirés en grande partie — comme ceux de beaucoup d'autres grandes cours européennes de l'époque — par ceux du château de Versailles.
Le Grand Jardin compte parmi les rares jardins baroques d'Europe à avoir conservé jusqu'à nos jours sa géométrie initiale, élaborée par l'architecte français Martin Charbonnier. D'une superficie de cinquante hectares, il est ceinturé sur trois côtés par un canal — appelé la Gracht — et comporte dans sa partie méridionale cinq superbes fontaines, celle du milieu, communément appelée la Grande Fontaine (cinquante-deux mètres de diamètre tout de même), indiquant le chemin vers le parc historique baroque grâce à son formidable jet d'eau projeté à plus de soixante-dix mètres de hauteur. Le Grand Jardin, qui comporte encore un théâtre baroque, un labyrinthe, une orangeraie et différents rosaires, accueille de nombreux évènements culturels, principalement en été, tels la Petite Fête au Grand Jardin — un festival de clownerie, mime et cabaret —, le Concours International du Feu d'Artifice, ainsi que des représentations de pièces et de comédies musicales du théâtre baroque.

Créé à la même époque que le Grand Jardin, le Berggarten ou Jardin de la Montagne était à l'origine un jardin potager censé fournir en fruits et légumes frais la cuisine de la maison princière. Mais la princesse-électrice Sophie de Hanovre manifestait un tel intérêt pour les plantes exotiques qu'elle consacra une grande partie de sa fortune à l'achat de nouvelles plantes et à l'édification d'une première serre en 1686. Le Jardin de la Montagne en vint ainsi à servir de plus en plus à la culture de plantes rares, et aujourd'hui, c'est un somptueux jardin botanique qui ne compte pas moins de onze mille espèces de plantes différentes, dont près de huit cents orchidées.

Elaborés quant à eux au XIXèmesiècle, le Georgengarten ou Jardin de Georges et le Welfengarten ou Jardin des Welfs s'inscrivent dans le style des jardins paysagers anglais, dont la composition proche du naturel s'oppose à la géométrie toute artificielle des jardins à la française. Ces deux derniers jardins constituent de nos jours des lieux de repos populaires, notamment pour les familles, le second servant en outre de parc de loisirs pour tous les étudiants de l'Université de Hanovre, situé en face dans le château Welfenschloss, ainsi qu'aux habitants du quartier limitrophe de Nordstadt.

Itinéraire : Berlin - Schmallenberg ( 518 kms - cinq heures et demie de route )

A. Berlin B. Hannover C. Schmallenberg